Les voix angéliques déstructurées me font fondre. Fall
en est gorgé jusqu'au sommet de la plus haute tour, qu'on entraperçoit
en arrière-plan, gommée par la stupeur bleue d'un brouillard perpétuel. ça y'est, je replonge. Oh ce que je ne donnerais pas pour l'oublier! ça fait des semaines que j'essaye, question de vie ou de mort, et pourtant...
Je
m'adresse alors à l'inconnue aux cheveux sombres aperçue quelques fois
dans mes rêves d'antan. Manifeste-toi, qu'on plonge vers l'avant!!
Il m'a suffi d'une seule écoute, tout comme des fois il nous
suffit d'un unique regard, pour tomber amoureuse. D'une douceur
inégalable de main de femme, guidé par l'espérance enfantine et bornée
d'instruments en symbiose, Wingtip se vit comme
un souvenir moelleux, de la trempe de ceux qui vous poussent à
continuer, malgré la lâcheté ambiante. Même les cuivres se coulent dans
l'atmosphère comme on se coule dans un vieux pyjama usé, fleurant bon
l'amour maternel. La pochette, d'une électrique contemplation promet le
plus fou des voyages, aux confins des rêves, à la limite de l'extase.
au diable la raison!
L'innocence récupère son royaume et pousse de ses petites mains
habiles son Roi sur un trône forgé de coussins, recouvrant le monarque
d'une couverture laineuse et, genou à terre, le nez vers le sol, elle
sourit.
Sous ses paupières closes pulsent une myriade de beats élastiques et de
sous son corsage s'élèvent quelques fragments de voix séraphiques et
blancs, tout étonnés de voir qu'il y a encore de la vie alentours. Les
corps malades, dont les entrailles broyées par l'ignorance des Autres
grésillent d'effroi, se tendent doucement vers la Lumière, en quête d'un
repos bien mérité.
J'exagère à peine en disant que cet album est touché par la Grâce. J'y
ai senti l'Amour , mais pas le bâtard que j'ai trop longtemps porté,
celui qui broie et qui déçoit. Là il s'agit d'Amour sans contrainte, de
Liberté.
Et même si je dors seule ce soir, en écoutant Wingtip
avant de m'évader, je ne crains plus les Ténèbres qui m'ont, les
derniers temps, bouffée, car mes sens seront tournés vers des horizons
moins mornes et peut être qu'enfin, demain, au réveil, je t'aurai
oubliée.
Un corps, ça s'apprivoise, ça se mérite. Et ta voix d'ange éclate en moi comme un essaim d'insectes chatoyants, nourris à la poussière d'étoile, camés jusqu'à l'âme, à moitié fous de ne jamais s'arrêter.