vendredi 27 novembre 2015

Milla Jovovic - The Divine Comedy



La sublime gonzesse de la cover, gaulée comme c'est pas permis, a émoustillé direct mon attention. 'Manque plus que son ramage soit à la hauteur de son plumage, et c'est dans la poche' me dis-je. Tiens, en parlant de poche, la mienne est gavée d'objets confisqués à de trépidants marmots, plus tôt dans la journée. J'enroule mes doigts autour d'une paire d'écouteurs blancs, sans marque, et les enfonce dans mes oreilles. Les premières notes déboulent en bondissant, ça a de la gueule;

la divine créature aux boucles crépitantes se matérialise devant moi. J'ai la gorge sèche, une quinte de toux me prend, comme un clebs enragé, ma bave bouillonne sans bruit. Je détourne alors le regard de son visage, taillé par un Pygmalion au sommet de son art, me risquant à scruter son cou, à croquer, et puis ses seins. Mes joues se brouillent d'un pourpre impétueux, c'que j'me sens bête

Elle fait mine de rien remarquer et continue de chanter, à poil devant l'éternité, blanche et délicieuse tout près de moi. J'ose pas bouger, ni même cligner des yeux, mon souffle enrage dans ma cage thoracique, frappant les os qui le retiennent ; hors de question d'interrompre ce miracle, aussi farouche qu' inattendu. Mais... j'hallucine ou elle s'approche? Je laisse sa main laiteuse frôler la manche de mon blouson, puis je ne rechigne pas non plus lorsque je sens son index appuyer délicatement sur mon poignet ; je baisse la tête. Au sol, une flopée de riffs semblent agrippés au bitume comme des grillons dans une brume épaisse et dangereuse, putain de délire! 

The Alien Song prend fin au moment où ses lèvres goûtent les miennes, je rouvre les yeux, elle a disparu. À l'endroit précis où elle se tenait encore quelques instants plus tôt, une colonne de fumée blanche qui s'évapore vers le haut, attends-moi, qui que tu sois, je te rejoindrai!

Du coup, j'ai pas écouté les autres morceaux mais je m'en fous, cette entrée en matière était si parfaite qu'il est impossible que le reste de l'album soit mauvais. 

Et puis, j'ai tout mon temps, pour le découvrir, les êtres divins sont éternels..


(1994)

jeudi 26 novembre 2015

Crystal Castles - Crystal Castles

2010
L'album s'ouvre de la pire manière qui soit : Fainting Spells n'a aucun charme, zéro raison d'exister. Flippant, à la première écoute, surtout si l'on a que cette galette à disposition pour deux heures de trajet - coincé sur les bords du Styx? Va falloir faire avec. Gratter la terre de ses doigts pourris afin d'y trouver une pièce quelconque à refiler au passeur.. Claquement d'ongles effrayés contre la track 2, qui débarque sournoisement, ses beats fondants de mélancolie aux abois. Et là, on se prend une grosse giclée de lumière crue en pleine face, le genre de lumière qui fait ressortir les cernes, aussi puissante qu'une caresse d'astéroïde ravagée, sorte d'uppercut mâtiné de douceur, délicieux Knock Out. Les 4 morceaux suivants sont du même niveau, et quel putain de niveau! Combo céleste et destructeur au goût granit envoyé par un colosse aux poings de feu, l'échine parcourue de Sa voix, voix qui se disloque et s'éparpille dans l'atmosphère, portée par un vent salé à l'haleine de glace.


III nous noyait dans d'Infinies Abysses gouvernées par la Terreur, mais, cet album-là déploie ses ailes forgées d'Espoir et, d'une série de battements savamment orchestrés, nous hisse vers le haut du tourbillon, déposant nos corps gorgés d'écume au pied des pierres tombales gravées en nos noms.




lundi 23 novembre 2015

D.I.E





La silhouette ronde et malhabile d'une vieille dame se dessine à l'angle de la grand'rue. 
Tirée par son chien surexcité, elle a du mal à préparer sa pipe : le cabot se cabre et aboie à en réveiller les morts, provoquant de fortes secousses qui tortillent la laisse, contraignant la vieille à éparpiller son tabac un peu partout, poussière de feu sur le trottoir, la voilà qui lâche une flopée de jurons acerbes, qui lui piquent la gorge au passage. 


Son clébard tire derechef, s'entaillant le cou à maints endroits. Ses coupures suintent sous le crépitement des lampadaires, armée bien sage de soldats aux longues jambes de métal, dont la patience, illimitée, éclaire les paumés du fond de la nuit, tu sais, ceux qui titubent après le verre de trop. 

Et toi tu regardes la scène non sans indifférence, lovée dans les bras de ton militaire bien avisé, "gaaaAAAaaaard'avous, troufions hystériques, ce soir, on passe à l'attaque" beugle un ancestral pirate à la jambe de bois; tu scrutes d'un oeil gavé d'MDMA ses vieux doigts craquer lorsqu'il serre son verre d'alcool, il se met ensuite à postillonner son whisky à la ronde, aspergeant aussi bien les déguenillés que les gens chics, qu'ils ont l'air cons, avec leurs alliances et leurs voyages, mais je vais te dire, petite , où que tu ailles, quoique tu fasses, t'auras toujours un truc coincé dans la tête, une petite image qui se floutera de plus en plus, ouais, mais une petite image quand même, appelle-ça gravure si tu veux, mais ton cerveau en est marqué jusqu'à la fin des Temps, et si t'avais ouvert ta gueule plus tôt, si tu t'étais bougée, on serait pas en train de se perdre dans ce trou noir cheloud qu'est devenu le présent, ce sale vaurien qui m'empêche trop souvent de sourire, heureusement qu'Elle est là, façonnée d'huile parfumée et de lave refroidie goût Macadamia Nut Brittle , étoile blanchie de caresses, vibrante d'espoir et délicieuse, qui n'a pas hésité une seule seconde avant de se jeter dans ce Vortex enragé qui boulotte  tout sur son passage ou presque, il reste bien quelques notes au creux de nos entrailles, oui mais , pour combien de temps? 


J'ai d'impériaux désirs qui demandent à être satisfaits de suite, hors de question d'attendre un siècle ou deux, qui sait par qui ou quoi nous serons écrasés demain, nos corps continuent tranquillement leur glissade silencieuse vers le Néant, sans remous, si bien qu'on serait tenté de se croire Immortel(le)(s) TU PARLES! On a tous une laisse qui nous brisera les os un jour, mourir d'Amour ou transpercés de balles quelle importance? Ce dont mes particules radioactives se souviendront, lorsqu'elles tintinnabuleront dans le Cosmos, ce sera de l'odeur de sa peau assouplie de sommeil dont je m'enivre à perdre haleine, et tant pis pour ceux et celles qui rêvent de m'oublier,

c'est les mains dans les poches, 
l'esprit libéré 
sous l'haleine des Comètes en approche
que je fredonnerai leurs secrets



vendredi 20 novembre 2015

Crystal Castles - III

2012


Je la revois devant ce club, au fond d'une nuit sans lune, adossée à un mur couvert de mousse fondue; ses pieds pataugeaient dans des flaques de lumière bleue, son rire ardent me brouillait les tripes. Je l'ai sentie tout contre moi, sans artifices, la chaleur de ses lèvres glissant le long de ma nuque, bondissement étouffés de limace tiède , en cercle, comme pour tracer cette fragile auréole au goût regret que j'ai longtemps cherchée.

Un coup d'oeil furtif sur la pochette suffit à l’envoûtement d'étendre son emprise en toute quiétude : 

"Trépidant tombeau à coeur ouvert, accueille la mère et Son fils sans trembler, puis laisse tes parois sales se tortiller sous les caresses taillées au sable sec de cette Main, (pâle comme le pouce d'un nourrisson mort-né) . N'aie crainte, dans peu de temps, je partirai


L'échine courbée en direction d'une boue teintée de rouge, j’agripperai ton cadavre pour l'écorcher afin de revêtir ta peau comme une cape triste, et tu pourras tremper tes mèches dans le flux de mes larmes acides, mâchouiller ce qu'il reste de mon âme, Toi qui m'a tout pris, n'oublie pas d'éteindre en partant. 

Si j'ai longtemps ignoré cet album, c'est parce que je savais comment ça finirait. Et j'en vomis des litres d'eau sur le carrelage de ma cellule. Un prêtre passera probablement par là, à l'occase. Il n'aura qu'à se servir afin d'asperger le front de ceux qui ne peuvent pas voir, les bêtes dépourvues de globes oculaires, ces bestioles dont les queues repliées chatouillent le menton des étoiles, gigantesques Chimères nourries au mamelon de la Survivance, malades de vivre sur un sol qui régurgite le moindre de leur mouvement. 

ah, voilà le genre de trucs auxquels tu songes avec ce skeud dans les oreilles, et ça me glace la nuque d'affronter ça.. surtout qu'on aurait pu choisir l'autre passage, le p'tit chemin tranquille et parfumé , bordés de cerisiers en fleurs, nos visages tendus vers le soleil, l'arrête du nez chatouillée par la sueur d'une belle soirée de printemps." 

Oublie. La chanteuse balaye le tableau idyllique d'un revers de la voix, et l'on se retrouve la gueule dans les limbes, groggy et fascinés par ce timbre fantomatique échappé d'Outre-Tombe qui résonne, résonne, résonne, à te rendre complètement fou. 

troublant!


mardi 17 novembre 2015

Enki - Melechesh

2015


Avec leurs ganaches de touaregs de l'Apocalypse, les membres du groupe polarisent la rétine pour mieux la déboulonner ensuite, à grand renfort de riffs furieux et radioactifs - les chairs pulsent puis fondent , les ongles arrachent frénétiquement d'épais lambeaux de peau du contour des squelettes hébétés. L'album coupe court à toute demi-mesure , écrasant l'auditeur sous une couche de sable rêche d'entrée de jeu. Les tympans se brouillent, les respirations se hachent, bousculés par l'âpreté des morceaux ; ces derniers fracassent les corps de plein fouet , qui s’amoncèlent en crépitant, sortes de Dune électriques aux reflets de Mort.

Au loin, les guitares se tordent en glapissant à chaque coup de patte contre leurs cordes tendues, quant au sang épais et boueux du chanteur, il empoisonne l'air à force de suinter. Enki, Maître des eaux souterraines, liquéfie l'auditeur, contraint de se foutre à genoux, la langue pendante, dévoré par des mélodies tout droit sorties des Enfers .

Quel pied! 


mardi 3 novembre 2015

OSV - R23X

L'ennui avait glissé en lui, révélant la mollesse de ses formes aux êtres qu'il croisait. Sous son épiderme souillé, un brouillard pateux bouillonnait. Quelques effluves dégoulinait de sa bouche entre ouverte
 >j'ai besoin d'un putain de fixe électronique, vite!

Il s'engouffre sans réfléchir dans un magasin de vinyles, le visage piqué de sueur.  Des murs sales et tapissés de disques vibrent à son passages, les voilà prêts à s'effondrer sur sa gueule, vite, il lui faut de la came, un truc bien complexe qui l'occupera une bonne partie de la nuit, un skeud qui t'émeut autant qu'il te chatouille les neurones. 


Il ne faut pas longtemps à son regard fiévreux pour être happé par une pochette démente, d'une beauté naturelle au gout de catastrophe nucléaire, avec ces trois lettres, tamponnées au foutre : O S V --> Original Sound Version 



les kanjis liquides finissent d'éveiller sa curiosité, va pour cet album d'R23X!  


Tracks fulgurantes, accords accrocheurs, bon dieu qu'il rage de ne pouvoir étirer le temps, écraser ses morceaux favoris, s'y cramponner . Mais c'est d'une oreille pitoyablement humaine de junkie à la masse qu'il perçoit l'album, peut-il en saisir toutes les subtilités? 

Le pauvre morfle sévère. Le morceau d'ouverture, Cross The Ocean, vient lui cracher son synthé mélancolique à la tronche, sa gorge s'assèche, il lui faut une miette de rivage, un truc auquel se raccrocher. Trouvera-t-il un peu de paix dans les échos détraqués de la voix d'Human Race? Perdra-t-il définitivement la boule au milieu de Metropolis et son rythme fou, vertigineux? 


Le crâne troué de copeaux électroniques, la chair mouillée de plaisir, notre type entre rapidement en transe; sa mâchoire claque, ses orbites roule silencieusement - c'est à genoux contre la moquette qu'il termine l'album , 20 minutes plus tard, la langue sèche et rappeuse comme du papier de verre.


Personnellement,  la dernière track, Airship, m'a assommée. Si mignonne, dans sa retenue délicieuse, si fragile, dans son enveloppe de synthé stellaire, léchée de toute part par des glitchs discrets et pourtant si redoutable, par sa portée...